Lorsqu’on regarde les déficits et les surplus cumulés des 10 dernières années, on constate que le gouvernement fait un surplus budgétaire total de 3,4 milliards de dollars. Sur le temps plus long, le déficit n’est donc pas si inquiétant.
Le poids de la dette se mesure aussi par les montants payés par le gouvernement au service de la dette à chaque année. Le service de la dette est à son plus bas historique, soit à 5,9% des dépenses budgétaires, alors qu’elle représentait 11,4% des dépenses en 2013-2014.
L’austérité est un régime de gouvernance économique qui soumet les finances publiques à une logique d’entreprise, dans le but de réduire la taille et le rôle de l’État dans l’économie. Elle repose sur des réformes structurelles, la compression des dépenses et la marchandisation des services publics. En période d’austérité, le gouvernement procède à une réduction marquée de ses dépenses, notamment en supprimant des postes et en diminuant les investissements dans certains secteurs tels que la santé, l’éducation et la fonction publique
Depuis le milieu des années 1990, les politiques d’austérité ont été appliquées de manière cyclique au Québec, nuisant périodiquement à la vigueur de l’économie.
Ces choix politiques affectent la population québécoise dans son ensemble. Voici quelques-unes des conséquences que l’on peut observer :
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L’austérité nuit à la qualité et à l’accessibilité des services
Les diminutions de personnel et la mise en place d’horaires restreints pour l’accessibilité aux services allongent les délais et compliquent l’accès aux services essentiels, affectant directement les citoyennes et citoyens.
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L’austérité coûte cher
Les coupures de personnel forcent le gouvernement à recourir à la sous-traitance, qui coûte plus cher que le travail en régie interne, et qui entraîne une perte d’expertise.
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L’austérité est mauvaise pour la démocratie
En coupant dans les services publics, l’austérité érode la confiance de la population envers les rouages démocratiques de l’État, et alimente les discours antisystèmes néoconservateurs.
En diminuant la qualité et l’accessibilité des services, l’austérité affaiblit la légitimité des institutions publiques et gruge la confiance que la population peut avoir envers les fonctionnaires. Elle nourrit donc également les discours complotistes et alimente la crise démocratique.
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L’austérité est mauvaise pour les travailleuses et les travailleurs
Les coupures font augmenter la charge de travail des personnes employées dans la fonction publique, diminuent leurs moyens de faire un travail adéquat, et rompent le lien de confiance avec l’employeur. L’austérité nuit donc directement à la santé mentale des fonctionnaires.
En plus de mener à des pertes d’emplois, qui touchent les plus jeunes de manière disproportionnée, l’austérité fait augmenter les risques d’épuisement professionnel. Elle intensifie la charge de travail, mais nuit également à des facteurs de protection de la santé psychologique, comme le support du gestionnaire et des collègues ou le sentiment du travail bien fait. L’austérité fait également diminuer notre poids collectif en période de négociations.
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L’austérité est mauvaise pour l’économie
En ralentissant les dépenses gouvernementales, le gouvernement contribue au ralentissement économique, ce qui est particulièrement néfaste en période de récession économique.
Plusieurs études démontrent que chaque dollar dépensé dans les services publics en rapport plus encore dans l’économie. C’est par les investissements publics que les gouvernements sont sortis des crises économiques majeures du 20e et du 21e siècle. L’austérité est donc une mauvaise réponse aux ralentissements et aux récessions économiques.
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L’austérité est mauvaise pour les femmes
En sabrant dans un secteur où les femmes sont surreprésentées, l’austérité les précarise. En réduisant l’accès aux services et aux prestations sociales, l’austérité accroît également les charges invisibles supportées par les femmes et encourage le travail gratuit réalisé par celles-ci.
Les femmes composent la majorité de l’effectif dans les services publics, l’austérité représente donc une attaque directe à leurs emplois. Puisqu’elles assument s’occupent encore disproportionnément des tâches liées aux soins des enfants ou à la proche-aidance, l’austérité amplifie l’importance du travail non-rémunéré qu’elles effectuent, et nuit à l’atteinte de l’égalité des genres.
Tableau: Comparaison de l’impact des mesures d’austérité pour les femmes (droite) et les hommes (gauche) en M $, 2015-2016
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L’austérité est mauvaise pour notre filet social
En coupant dans des services comme l’aide sociale, l'aide à l’intégration des nouveaux arrivants, l’IVAC ou la CNESST, l’austérité appauvrit les plus précaires et creuse les écarts de richesse.
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L’austérité est mauvaise pour les générations futures
L’austérité camoufle des passifs, comme le déficit d’entretien en infrastructures ou la dette environnementale. En procédant à des coupes austéritaires, le gouvernement met sur le dos des plus jeunes le coût de la crise environnementale et de la réfection des routes, des écoles, des hôpitaux et des bâtiments gouvernementaux.
En faisant diminuer la réglementation, les investissements publics dans les infrastructures vertes et les activités de contrôle et d’inspection environnementales, l’austérité est également un recul net face à la crise climatique.
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L’austérité est mauvaise pour l’identité québécoise
Ce qui fait que le Québec est distinct du Canada, c’est entre autres l’héritage de la Révolution Tranquille, et la construction d’une identité collective ancrée autour de services publics universels et de qualité. En coupant dans cet héritage, c’est à l’identité du Québec que l’on s’attaque.
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L’austérité amplifie la fracture numérique
Le remplacement du personnel de la fonction publique par des systèmes automatisés nuit à l’accessibilité et à la qualité du soutien offert à la population.
Propositions
Même si la CAQ présente l’austérité comme la seule avenue, il convient de souligner que des solutions alternatives existent et que le fait de ne pas y avoir recours est un choix politique.
Certaines dépenses gouvernementales seraient, selon nous, à reconsidérer :
Investir dans les services publics
Plusieurs études démontrent que chaque dollar investi dans les services publics génère des retombées positives dans l’économie du Québec. Il faut investir plutôt que couper!Valoriser le filet social
Il faut renforcer le filet social (CNESST, Régime des rentes du Québec, aides sociales, assurance-parentale) pour éviter l’accroissement des inégalités et l’appauvrissement d’une partie de la population.Le recours excessif à la sous-traitance, découlant directement du sous-investissement chronique de l’État dans ses propres ressources internes, le rendant presque inévitable.
Les subventions et mesures fiscales facilitantes aux entreprises privées, comme les investissements de 270 millions dans Northvolt et de 180 millions dans Lion Électrique, qui se sont soldés par des pertes. Les financements publics devraient être conditionnés à plusieurs critères, notamment le respect absolu des normes environnementales et linguistiques en vigueur au Québec et l’utilité sociale de la production de l’entreprise financée.
En outre, nous suggérons également de nouvelles mesures ou de revoir certaines mesures qui permettraient d’augmenter les revenus du gouvernement. Celles-ci ouvriraient la voie à un réinvestissement dans la fonction publique et dans tous les autres secteurs, pour bâtir une société plus équitable :Un impôt sur la valeur nette de l’actif des ménages faisant partie du 1%.
Une lutte plus vigoureuse contre l’évasion fiscale et les paradis fiscaux, notamment en dotant Revenu Québec de plus de ressources afin qu’il puisse être davantage proactif.
Une révision des crédits d’impôt aux grandes entreprises : plusieurs crédits d’impôt sont accordés sans garantie de retombées économiques qui bénéficieraient à la majorité.Une augmentation du taux provincial d’imposition des grandes entreprises, abolir le crédit d’impôt sur les gains en capital des particuliers et réduire les crédits d’impôt pour dividendes.
Des alternatives à l’austérité, il y en a plusieurs!
Diminuer la sous-traitance
Les montants accordés à la sous-traitance sont passés de 4,7 à 11,8 milliards de dollars entre 2019 et 2024. Ils ont augmenté 3 fois plus vite que le budget de dépenses du Québec pendant cette période. S’attaquer à la sous-traitance permettrait à la fois de réduire les dépenses et de rapatrier l’expertise à l’interne du gouvernement.
Fini, les cadeaux sans contrepartie aux entreprises
Les cadeaux fiscaux aux entreprises ont augmenté de plus de 80% sous le présent gouvernement, faisant perdre plus de 6 milliards de dollars par année aux finances publiques. Tout cela sans compter le gaspillage de milliards de dollars en mauvais investissements dans des entreprises étrangères comme Northvolt ou Airbus. Un meilleur contrôle des flux d’argent public vers les entreprises privées permettrait de sauver des milliards chaque année.
Une fiscalité plus équitable
Une taxation et une meilleure imposition des ultrariches pourrait rapporter des milliards de dollars dans les coffres du Québec, sans impacts sur plus de 90% de la population. Des milliards de dollars peuvent aussi être récupérés en luttant plus efficacement contre l’évasion et l’évitement fiscal ou par des mesures d’écofiscalité.
2024 - Septembre
Gels d'embauche
Annonce de gels d’embauche dans certains ministères, comme le ministère des Transports. Les annonces mentionnent que les gels devraient cesser en mars 2025.
2024 - Septembre
Restrictions budgétaires
La fonction publique subit une vague de restrictions budgétaires : des limites à la formation touchant principalement le personnel technique et de bureau sont mises en place, des restrictions aux déplacements empêchent le personnel d’inspection de couvrir l’ensemble du territoire québécois, etc.
2024 - Novembre
Premières vagues de mises à pied
Le gel d’embauche s’applique à tous les ministères et organismes à parti du 1er novembre. Les premières vagues de mise à pied d’occasionnels ont lieu.
2025 - Janvier
Plus vite, les mises à pied!
On constate une accélération des mises à pied des occasionnels de la fonction publique et des impacts sur les services à la population.
2025 - Avril
Abolir 2000 postes
Les annonces budgétaires quant aux objectifs de réduction d’effectifs se clarifient; François Legault réclame l’abolition de 2000 postes dans la fonction publique.
2025 - Juillet
CNESST: -250 postes
Malgré un mode de financement autonome, la CNESST abolit 250 postes.
2025 - Août
Abolition de centaines de postes supplémentaires
Abolition de centaines de postes supplémentaires dans plusieurs ministères et organismes.
2025 - Septembre
6000 à abolir
La présidente du Secrétariat du conseil du Trésor, France-Élaine Duranceau, demande à tous ses collègues d’abolir certains programmes et de réduire encore plus l’effectif total de la fonction publique. Le gouvernement met en place un plan d’abolition de 6000 postes sur 3 ans.
2025 - Septembre
Nouvelle vague de coupures
Nouvelle vague de coupures dans plusieurs ministères, certaines personnes détenant une permanence sont mises en disponibilité.
2025 - Septembre
3000 emplois disparus
On estime que 3000 emplois ont disparu de la fonction publique depuis septembre 2024.
2025 - Octobre
La SAAQ abolit une centaine de postes
Des employés en contact direct avec la population sont touchés ainsi que l'équipe informatique.
2025 - Octobre
Depuis un an, 136 postes abolis au ministère de la Justice.
Procès annulés à cause des délais, poursuites abandonnées faute de bras, droits des victimes bafoués. L’abolition de postes menace le système de justice criminelle
2025 - Octobre
Plainte collective pour climat de travail toxique
Plainte déposée à la CNESST. La stratégie d'austérité du gouvernement à l’égard de la fonction publique a engendré des situations dangereuses qui créent un climat de travail toxique, malsain et un stress important chez les travailleurs de l’État.